a./ Dès lors, l’ambivalence humaine tient au défi que présente cette référence à l’infini. Elle est difficile à soutenir tout au long d’une vie. L’acteur humain perd l’intuition de sa néoténie. Elle devient ignorée, méconnue, délaissée, pervertie, déniée.
b./ Sa perpétuelle possibilité de changement lui apparaît comme un éternel recommencement qui fatigue, lasse, décourage. Il aspire à être définitivement un être singulier, plein et entier.
c./ C’est alors qu’il finit par croire qu’il existe des situations qui permettent cela. Il se livre tout entier à travers des engagements absolutisés : religieux, politiques, économiques, informationnels. Il abandonne sa référence à l’infini. Il ralentit, freine, et finit par arrêter ainsi son devenir.
d./ Comme les pseudo-absolus sont nombreux, des ensembles humains divers choisissent des absolus différents comme identités. À partir de là, chaque ensemble humain singulier peut prétendre que son seul absolu est véritable. D’où des radicalisations permanentes qui, dans l’histoire humaine, conduisent à des meurtres locaux ou de masse constamment repris.
e./ Le défi de l’infini est gravement rejeté. Les humains rivalisent non pour l’infini mais pour des supériorités étroites qui les satisfont et à travers lesquelles ils abandonnent le réel de leur condition vitale existentielle. Ils abolissent en effet leur interdépendance obligée, autrement féconde. Une humanité morcelée se détruit, elle-même et la nature. Double déficit : d’éthique côté humains et d’écologie côté nature.